Книга: Jacobsen R. «The Unseen»

JACOBSEN (R.)

JACOBSEN ROBERT (1912-1993)

Sculpteur du fer qu’il martèle en tiges ou en plaques, le Danois Robert Jacobsen a élaboré pendant plus de soixante ans une œuvre abstraite, faite de compositions dépouillées et rigoureuses, où s’affrontent en une stricte discipline, parfois nuancée d’une certaine fantaisie, la courbe et l’angle droit qui, à eux seuls, organisent et rythment dynamiquement l’espace. Totalement autodidacte, Jacobsen exerça de nombreux métiers avant de se consacrer à la sculpture. Influencé tout d’abord par les artistes allemands, ses premières œuvres, des sculptures sur bois, sont de tendance nettement expressionniste. En 1941, il adhère au mouvement Host, qui regroupe au Danemark l’ensemble des artistes que séduisent les idées et l’esthétique surréalistes, et il s’intéresse d’autre part, comme nombre de ses contemporains, à l’art populaire viking. Jacobsen s’oriente à cette époque vers la taille directe de la pierre, en général la plus dure, le granite, et élabore ses premières sculptures abstraites. Quelques années plus tard, il s’installe à Paris et, dès ce moment, il impose le fer comme son matériau de prédilection. Si ses admirations vont alors à Rodin, à Henri Laurens et à Jean Arp, Jacobsen est surtout sensible à l’art du peintre Alberto Magnelli, chez lequel il apprécie ce constant souci d’accorder la rigueur de la construction à l’esprit de liberté, souci qu’il ne cessera dès lors de faire présider à sa propre œuvre sculptée. Travaillant le fer directement, sans jamais faire une esquisse ou un dessin préalable, Jacobsen le modèle à froid au marteau, en conservant au métal son aspect brut, que vient rompre par endroit la marque de quelques soudures. Des éléments étrangers, comme des morceaux de grille ou des plaques de marchepied, la possibilité pour le spectateur d’intervenir en variant la disposition de tel ou tel élément mobile, l’utilisation de la polychromie, animent parfois ces formes aux compositions ordonnées et rigoureuses. Faites de lignes rigides ou courbes, les œuvres du sculpteur se développent dans l’espace en une série de variations qui jouent essentiellement de l’agencement des plans, de l’accord des contrastes, ainsi que des rythmes et des tensions, variés jusqu’à l’infini, que ces lignes peuvent susciter. Parallèlement à ses sculptures abstraites, Jacobsen a créé entre 1949 et 1957 tout un univers de figurines originales et expressives, pleines de fantaisie et d’humour, et chargées d’une symbolique profonde (Les Poupées ). Fabriquées avec une grande virtuosité à partir de quelques débris de ferraille, elles sont, selon Eugène Ionesco (in XX^e Siècle , n^o 15, déc. 1960), «la projection, l’expression, les visages, l’obsession de rêves, de frayeurs, de façons d’être et de voir qui sont de tous les temps et qui percent à travers le temps». Robert Jacobsen a été professeur à l’Académie des beaux-arts de Munich; en 1969, il a regagné le Danemark. Renouant avec la construction et la rigueur, il a, dans l’acier ou le fer, amené ses sculptures jusqu’à l’extrême de leurs limites et confronté leurs formes pures et dépouillées aux dimensions du monumental (K A 13 , 1976; L’Unesco , 1993). On trouve la même tendance dans ses eaux-fortes, technique qu’il a pratiqué parallèlement à la sculpture. Son œuvre a été présentée lors d’une rétrospective itinérante en 1991-1992.