Книга: Woolf V. «Mrs Dalloway»

Mrs Dalloway

In this vivid portrait of one day in a woman's life, Clarissa Dalloway is preoccupied with the last-minute details of party she is to give that evening. As she readies her house she is flooded with memories and re-examines the choices she has made over the course of her life.

Формат: Мягкая глянцевая, 208 стр.

ISBN: 9781784871697

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WOOLF (V.)

WOOLF (V.)

Issue d’une famille d’«éminents victoriens», comme les appelait Lytton Strachey, Virginia Woolf a voulu dégager le roman anglais de la gangue des traditions et du formalisme qui l’enveloppait, l’affranchir de toutes les normes pour créer un «roman de l’avenir». Sa recherche s’est poursuivie à travers chacune de ses œuvres romanesques, que Marguerite Yourcenar a définies comme des «biographies de l’être». Ce ne sont plus les types, les caractères, les catastrophes ou les drames de l’amour qui sont les ressorts du récit, mais la transformation des consciences, cette région obscure de la personnalité que Henry James, Proust et les romanciers russes avaient déjà explorée, les instants fugitifs, les «moments de vision», tout ce qui forme «le halo lumineux, l’enveloppe semi-transparente qui nous entoure du commencement à la fin de notre état d’être conscient».

Sous le signe de la tragédie

Née à Londres, fille d’un critique remarquable, Leslie Stephen (homme à la fois faible et tyrannique qui servit de modèle au Vernon Whitford de L’Égoïste de Meredith), et de Julia Duckworth, Virginia Woolf eut une enfance très tôt marquée par la tragédie. Du premier mariage de son père avec une fille de Thackeray, une enfant anormale était née, qui devait vivre internée jusqu’à sa mort en 1945. Du premier mariage de sa mère, Julia, avec Duckworth, trois enfants étaient nés, dont le fils aîné, George, devait jouer un rôle des plus importants et des plus ambigus auprès de Virginia, sa demi-sœur et sa cadette de quatorze ans. Ensemble, les Stephen eurent quatre enfants: Vanessa, qui épousa le critique Clive Bell, Thoby (qui mourut d’une fièvre typhoïde à vingt-six ans), Virginia et Adrian. On voit la complexité de cette constellation familiale et l’importance que durent avoir tous ces traumas des premières années. Virginia était d’autant plus vulnérable qu’elle avait perdu sa mère à l’âge de quatorze ans, alors que se précisaient les assiduités de son demi-frère George. Pour toute cette période, le lecteur doit se référer à la biographie, remarquable à tous points de vue, que son neveu, Quentin Bell, a consacrée à Virginia Woolf, biographie qui s’appuie sur les journaux et les lettres inédites de la romancière et montre combien son adolescence fut continuellement frôlée par la mort et la folie. Après des fiançailles rapidement rompues avec Lytton Strachey, Virginia se résout en 1912 à épouser Leonard Woolf, dont la finesse et la compréhension intelligente empêchèrent sa femme de sombrer dans la maladie qui ne cessait de la guetter. La névrose devait en effet éclater avec violence par trois fois dans la vie de Virginia Woolf: en 1895 quand mourut sa mère; en septembre 1913 quand fut accepté son premier roman, La Traversée des apparences (The Voyage Out ); et en 1940 alors qu’elle achevait son dernier roman, Entre les actes (Between the Acts ), crise qui se termina par son suicide, le 28 mars 1941, jour où elle se noya dans la rivière qui coulait au bas de la propriété de Monk’s House, Rodmell, près de Lewes.

Après leur mariage, Virginia et Leonard Woolf partagèrent leur vie entre une maison de campagne, à Asham, et Brunswick Square, à Londres, où ils étaient liés avec tous les écrivains et les peintres qui firent partie du groupe de Bloomsbury. Célèbre entre les deux guerres, ce groupe rassemblait, entre autres, D. H. Lawrence, Katherine Mansfield, le critique d’art Roger Fry, Lytton Strachey et sa sœur Dorothy Bussy, qui fut amie de Gide. Les Woolf fondèrent ensemble la Hogarth Press qui édita certains des auteurs les plus marquants du siècle, Rilke, Svevo et Freud. Virginia Woolf avait commencé à écrire dès 1904 (des articles de critique littéraire), mais c’est en 1913 qu’elle achève son premier roman, La Traversée des apparences , bientôt suivi par des articles pour le Times Literary Supplement , des essais, et d’autres romans, depuis Nuit et Jour (Night and Day ) jusqu’à Entre les actes .

«Biographies de l’être»

Ces romans révèlent un conflit incessant entre les qualités de synthèse masculines et les qualités de fusion féminines; aucune romancière n’a sans doute mieux capté la dissolution inhérente au monde des femmes où tout se détruit au fur et à mesure de sa naissance, monde perméable et poreux infiniment vulnérable: il suffit, comme dans la nouvelle Une aventure londonienne, que passe une naine pour que la rue se peuple de monstres, pour que le moi doute de lui-même et de sa normalité. Tout porte la femme à l’évaporation du moi au lieu de la concentration: sa coquetterie, son désir de séduire et d’amadouer le monde masculin souvent décrit comme brutal et violent; la condition inféodée où elle vit – la femme n’a pas droit aux mêmes études, aux mêmes espaces que les hommes, comme l’indique la romancière dans ses essais polémiques, Une chambre à soi (A Room of One’s Own ) et Three Guineas ; et même cette tendance à une vie mystique où la femme cherche à s’oublier et à se perdre. Contre la dispersion Virginia Woolf n’a cessé d’opposer un travail incessant, et son Journal est peut-être l’œuvre qui révèle le mieux combien l’écriture était pour elle une arme contre la désagrégation, l’égocentrisme, la «mélancolie de naissance» et le doute de soi. Mais, si ce besoin d’affronter la difficulté, l’obstacle et le mot affirme une tendance virile à contrebalancer les faiblesses de la nature féminine, il procure moins une issue qu’un surcroît de tourments. Virginia Woolf conserve une certaine méfiance vis-à-vis des qualités d’observation et de synthèse nécessaires à l’écrivain: «La peinture du monde est inexacte. Ce n’est qu’une peinture d’écrivain», écrit-elle dans son Journal , et encore: «Je commence à haïr l’introspection.» Elle est à la fois fascinée par la contemplation du moment (ce qu’elle appelle «la vie mystique d’une femme») et par la nécessité de fixer cet instant éphémère grâce au défi que l’écrivain ne cesse de vouloir lancer à la mort. Sa folie n’a pu que s’augmenter de ces dilemmes sans solution puisqu’ils ramènent toujours au moi qu’il faut fuir, si l’on veut atteindre à cet impersonnel qui permet le salut. La personnalité féminine subit d’ailleurs sans cesse l’agression de l’homme, car l’univers masculin est imperméable, il se suffit à lui-même, et par là même ampute le féminin. Les hommes sont «renfermés, organisés, admirables, laconiques, objectifs, très bien pourvus». Dans La Promenade au phare (To the Lighthouse , 1927), ce roman si plein de réminiscences, la seule présence de Mr. Ramsay (souvenir de Leslie Stephen?) empêche Lily Briscoe de peindre. Dans la cruelle nouvelle de La Dame au miroir, le monde préservé d’Isabelle est fracturé, «flou, méconnaissable» dès qu’un homme y pénètre. La mort seule paraît plus forte que le monde masculin; elle est un lieu de fuite et de vengeance, comme dans la nouvelle Le Legs , où une femme se suicide en laissant dans son journal le nom de son amant. Il n’y a pas de héros dans ce monde victorien fracassé (sauf ceux qui sont des projections de son jeune frère Thoby, comme le Perceval des Vagues ), et l’amitié amoureuse entre femmes semble y avoir remplacé le sentiment de l’amour. Mais, dans la fable fantastique d’Orlando (1928), le héros androgyne (inspiré par la belle romancière Vita Sackville-West) a beau cumuler les personnalités et les sexes, traverser le cours des siècles, il n’empêche qu’à force de vivre ainsi dans une oscillation perpétuelle il aboutit à une désintégration totale de l’être dont la faute est peut-être l’objectivité. «Dois-je maintenant respecter l’opinion de l’autre sexe, si monstrueuse que je la trouve?» se demande Orlando. Si la subjectivité enferme et désespère, l’objectivité disperse et détruit la personne: une fois de plus, il n’y a d’absolu que la mort.

La difficulté d’être, au centre du roman woolfien, est essentiellement spirituelle. C’est pourquoi dans ses essais critiques (The Common Reader ) l’écrivain se détourne de romanciers «matérialistes» comme Wells, Bennett et Galsworthy, peintres du banal et du transitoire, pour évoquer l’intense splendeur de la littérature élisabéthaine et se tourner vers Dostoïevski et le roman russe dont la profonde tristesse, la simplicité dépouillée décrivent les rapports de l’âme et de la sagesse. La technique de Virginia Woolf consiste à saisir les vies à travers certains instants révélateurs – ces «bribes» qu’elle aimait tant dans l’œuvre de Tchekhov –, et dont l’ensemble donne de l’être une vision impressionniste mais totale. Elle veut suggérer la complexité finalement impersonnelle de la vie en imbriquant étroitement les existences, comme dans Mrs. Dalloway (1925) où les pensées intimes, les monologues intérieurs, les instants clefs de plusieurs personnages s’entrecroisent au cours d’une durée limitée à une seule journée. Cette technique sera reprise et portée à sa perfection dans Les Vagues (The Waves , 1931), dont un des personnages, Rhoda, dira des autres: «Ils s’entrelacent mutuellement et forment une sorte de lanière qui me cingle au visage.» Elle atteindra son expression ultime, presque décharnée, dans Entre les actes , et il est possible que la romancière fut consciente de ne pouvoir aller plus loin que ce récit, où tout se passe avant et après la représentation d’une pièce, lors des entractes, et où les caractères ne sont plus que des symboles. On voit quelle rupture Virginia Woolf a opérée avec le roman de situations traditionnel. C’est l’âme seule qui lui importe, avec «ses maladies virulentes et ses fièvres furieuses». Or, écrit-elle, «l’âme est antipathique aux Anglais»; elle «a peu le sens de l’humour et nul sens du comique. Elle est informe. Elle n’a qu’un mince lien avec l’intellect. Elle est confuse, diffuse, tumultueuse...» Peut-être le chef-d’œuvre de Virginia Woolf, le livre où elle saisit le mieux ces «moments de vision», est-il Les Vagues, où six personnages se livrent à des monologues intérieurs dont chacun concerne la solitude essentielle de l’être, cette solitude qui seule «délivre de la pression du regard, de la sollicitation des corps, de la nécessité de la parole et du mensonge», et que Virginia Woolf a voulu connaître de façon absolue dans la mort.

Источник: WOOLF (V.)

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