LEROUX (G.)
LEROUX (G.)
LEROUX GASTON (1868-1927)
Gaston Leroux est un des deux ou trois écrivains français qui ont fondé le roman populaire du XXe siècle. À la suite d’Émile Gaboriau, et parallèlement à Maurice Leblanc, son exact contemporain, il a introduit, dans un genre où les péripéties romanesques restaient dominantes, l’énigme criminelle et le dénouement raisonné, dont le développement allait très vite déboucher sur le roman policier.
Né à Paris le 6 mai 1868, de parents normands, Gaston Leroux passe son enfance dans le pays de Caux et fait ses études au collège d’Eu. Il revient à Paris pour y étudier le droit, et s’inscrit effectivement au barreau où il plaide, pendant quelques mois, en correctionnelle. Mais il s’y ennuie beaucoup. En 1891, il quitte le barreau pour le marbre et devient chroniqueur judiciaire à
L’Écho de Paris et au
Matin : il y donnera,
notamment, les comptes rendus d’audience de l’affaire Dreyfus.
En 1895, le voici grand reporter. Il réussit quelques interviews retentissantes, comme celle de Nordenskjöld de retour du pôle Sud, et celle du prince d’Orléans. De 1904 à 1906, il se trouve en Russie, où il réalise de remarquables reportages sur la guerre russo-japonaise et l’insurrection nihiliste.
Dès 1901, il a commencé à écrire des romans. Deux d’entre eux ont reçu un accueil favorable: La Double Vie de Théophraste Longuet (1903) et Le Roi Mystère (1908). À son retour de Russie, il abandonne le reportage pour se consacrer au roman-feuilleton. En 1907, dans L’Illustration , paraît Le Mystère de la chambre jaune , qui connaît un succès foudroyant. L’année suivante, il se fixe sur la Côte d’Azur, où il écrit deux ou trois ouvrages par an. Il meurt à Nice, le 15 avril 1927, d’une crise d’urémie.
L’œuvre complète de Gaston Leroux compte quarante-six volumes, dont trois recueils de reportages, six pièces de théâtre et trente-cinq romans. Ceux-ci sont caractérisés par la richesse de l’invention, la rigueur du développement, la vivacité de l’écriture, le sens de la poésie et de l’humour. Ils appartiennent à des genres assez différents. On peut les répartir en quatre catégories principales.
Les romans de mystère classiques. Ici, la logique prime tout. Un problème est posé, qui paraît parfaitement insoluble. Au cours du développement du récit, le «détective» (ainsi que le lecteur) prendra connaissance de différents indices qui le conduiront, à travers des raisonnements déductifs et inductifs, jusqu’à une solution unique et indiscutable. Le Mystère de la chambre jaune et Le Parfum de la dame en noir (1907), deux premiers volumes de la série des Rouletabille , sont les romans les plus réussis de cette catégorie. Suivront Rouletabille chez le tsar , Rouletabille à la guerre , etc.
Les romans humoristiques. Ils constituent un sous-groupe de la catégorie précédente, puisqu’ils se présentent comme des romans d’énigme. Mais l’écriture malicieuse et le dénouement plus ingénieux que rigoureux conduisent à placer ces ouvrages à part. Le Fauteuil hanté est certainement le plus savoureux.
Les romans fantastiques. Ici, toutes les péripéties de l’histoire baignent dans une atmosphère surnaturelle. Les dénouements, qui se veulent toujours logiques, ne sont souvent que des pirouettes. Tel est le cas de La Double Vie de Théophraste Longuet et, plus encore, de L’Homme qui revient de loin .
Les romans d’épouvante. Bien que très proches, dans leur économie, du roman populaire traditionnel, ces ouvrages témoignent d’une imagination débordante, qui ne recule ni devant l’invraisemblable ni devant l’horreur. La Poupée sanglante , mais surtout les cinq volumes de Chéri-Bibi illustrent bien ce dernier groupe (Chéri-Bibi , Chéri-Bibi et Cécily , Fatalitas , Palas et Chéri-Bibi , Le Coup d’État de Chéri-Bibi ).
Les caractères décrits dans ces trente-cinq romans sont le plus souvent sommaires, stéréotypés: il s’agit là d’une convention bien naturelle du roman populaire, où les péripéties et les rapports entre les personnages prennent le pas sur l’analyse psychologique. On signalera tout de même deux exceptions, intéressantes parce que opposées:
Joseph Rouletabille ressemble étonnamment, si l’on en croit ses contemporains, au reporter Gaston Leroux. Son créateur décrit en détail son allure physique et son comportement, mais aussi ses états d’âme, ses angoisses, ses hésitations, ses enthousiasmes. Dans les derniers volumes de ses aventures, cependant, il perd un peu de son épaisseur.
La personnalité de Chéri-Bibi, au contraire, est presque insaisissable, d’abord parce qu’elle est modelée sur un stéréotype, celui du bagnard au grand cœur injustement puni; ensuite, parce qu’elle se modifie à plusieurs reprises. Ce personnage étrange, sans nuances, taillé à coups de serpe, traverse les cinq romans qui lui sont consacrés comme une sorte d’ouragan incroyable et fascinant.
Quelques phrases de Gaston Leroux ont atteint la célébrité. L’histoire littéraire conservera longtemps le contenu du billet adressé, par son persécuteur, à Mathilde Stangerson: «Le presbytère n’a rien perdu de son charme, ni le jardin de son éclat» (Le Mystère de la chambre jaune ).
Источник: LEROUX (G.)